Android 15 peine à convaincre : seuls 4,5 % des smartphones l'ont adopté

Sorti depuis plus de six mois, Android 15 peine à s’imposer. À peine 4,5 % des appareils Android en sont équipés, selon les dernières statistiques officielles publiées par Google. Un chiffre qui illustre les limites structurelles du modèle Android face à la centralisation d’Apple.
Une mise à jour en marge
Déployé officiellement à l’automne 2024, Android 15 – surnommé "Vanilla Ice Cream" – n’équipe au 1er avril 2025 que 4,5 % des smartphones et tablettes Android connectés au Play Store. Une proportion étonnamment faible pour une mise à jour majeure, qui devait apporter des avancées notables en matière de sécurité, d’autonomie et d’expérience utilisateur. À titre de comparaison, Android 14 culmine aujourd’hui à 27,4 %, suivi d’Android 13 (16,8 %) et d’Android 11 (15,9 %).
Même en tenant compte du rythme historiquement lent de déploiement des versions Android, ce retard interroge. Car en face, Apple annonce que 68 % des iPhones tournaient déjà sous iOS 18 en janvier 2025. Un contraste saisissant qui s’explique par des causes techniques, économiques… et culturelles.
La faute à la fragmentation Android
Contrairement à Apple, qui contrôle à la fois le matériel, le logiciel et la distribution, Google ne maîtrise que le système d’exploitation. Ce sont ensuite les constructeurs tiers – Samsung, Xiaomi, Oppo, Motorola… – qui doivent adapter Android 15 à leurs appareils, souvent avec une surcouche maison (One UI, HyperOS, ColorOS, etc.).
Ce processus prend du temps. Il nécessite des phases de test, des optimisations, parfois des compromis liés aux performances de modèles anciens ou à des contraintes régionales (certification des opérateurs, personnalisation locale…). Résultat : une mise à jour déployée par vagues, avec des mois de décalage.
Samsung, leader mondial du smartphone, illustre parfaitement le problème. Si la gamme Galaxy S25 dispose déjà d’Android 15 via One UI 7, la majorité du parc – notamment les Galaxy S21, S22, A54 ou A34 – n’a reçu la mise à jour qu’en avril… voire ne l’a toujours pas reçue. Et encore, il s’agit souvent de versions limitées géographiquement ou destinées à des bêta-testeurs. Un bug majeur découvert en cours de développement a même repoussé la sortie sur certaines séries à juin 2025, soit après l’annonce attendue d’Android 16 lors de la Google I/O du 20 mai.
Des nouveautés peu visibles
Android 15 n’est pas une révolution en soi. Parmi les principales améliorations figurent :
- Un mode économie d’énergie intelligent, qui s’adapte aux usages
- Une meilleure gestion des notifications par application
- Des protections renforcées contre les QR codes malveillants
- Des fonctions IA embarquées pour la productivité et la photographie
Mais ces nouveautés restent peu spectaculaires pour l’utilisateur lambda. D’autant plus que leur accessibilité dépend du matériel (capteurs, puces, IA embarquée…) et des choix des constructeurs quant à leur activation.
Un désintérêt des utilisateurs ?
Au-delà des délais techniques, beaucoup d’utilisateurs ignorent ou négligent les mises à jour Android. Il faut parfois naviguer dans des menus complexes pour forcer une mise à jour, avec des noms d’onglets et des parcours différents selon les marques. Certains utilisateurs redoutent également des bugs, des ralentissements, voire la perte de données.
Et il faut bien le dire : un smartphone Android âgé de trois ans ne recevra souvent plus aucune mise à jour système. Contrairement à Google et Samsung qui promettent désormais jusqu’à 7 ans de support sur certains modèles, la majorité des constructeurs se limite à deux ou trois ans de mises à jour. Une limite qui gèle l’évolution du parc installé.
Une situation critique pour l’écosystème
Cette faible adoption de la dernière version pose problème. Plus les utilisateurs se répartissent sur une multitude de versions, plus cela complique la tâche des développeurs d’applications, qui doivent assurer la compatibilité avec plusieurs itérations du système. Cela implique plus de travail, plus de tests, plus de correctifs… et donc plus de coûts.
Cela nuit également à la cybersécurité. Moins d’appareils à jour signifie plus de vulnérabilités actives, en particulier sur des versions d’Android vieilles de cinq, voire dix ans, qui ne reçoivent plus aucun patch de sécurité.
L’avenir : Android 16… déjà
La lente montée en puissance d’Android 15 ne laisse guère le temps de respirer. Déjà, Android 16 est en phase bêta. Google devrait en faire la démonstration complète lors de sa conférence I/O, avec un déploiement dès l’automne sur les appareils Pixel. Il y a fort à parier que certains smartphones n’auront jamais Android 15, passant directement de la version 14 à 16.
Android à la croisée des chemins
Le cas Android 15 n’est pas un simple accident de parcours. Il incarne les failles systémiques d’un écosystème trop fragmenté, où chaque acteur avance à son rythme et où les utilisateurs ne sont pas incités à rester à jour.
Si Google veut véritablement accélérer le rythme des mises à jour, il devra renforcer ses exigences envers les fabricants, simplifier l’expérience utilisateur et miser davantage sur les mises à jour modulaires via les services Google Play, qui permettent de diffuser des correctifs sans passer par une mise à jour complète du système.
En attendant, Android 15 restera probablement une version de transition, vite éclipsée par une 16e itération que l’on espère mieux accueillie… à défaut d’être mieux déployée.