Publié le  par Philippe

Suivi des règles : l'enquête qui révèle les limites et risques des applications menstruelles

Suivi des règles : l'enquête qui révèle les limites et risques des applications menstruelles

Largement adoptées par les Françaises pour suivre leur cycle ou mieux comprendre leur fertilité, les applications menstruelles se sont imposées comme des outils du quotidien. Elles accompagnent un mouvement de défiance envers certains moyens de contraception hormonale et répondent au besoin croissant de méthodes perçues comme plus naturelles.

Derrière leur apparente simplicité, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) révèle pourtant un ensemble de dérives préoccupantes.

Après avoir contrôlé, en 2024 et 2025, neuf des applications les plus téléchargées, l’administration alerte aujourd’hui sur des pratiques trompeuses, un manque de fiabilité et une gestion opaque des données personnelles.

Un succès nourri par la défiance vis-à-vis des contraceptions hormonales

Le recours croissant à ces applications s’inscrit dans un contexte de remise en cause des pilules ou implants hormonaux. Les inquiétudes liées aux effets secondaires, amplifiées par les discussions sur les réseaux sociaux, amènent de nombreux couples à privilégier des approches plus naturelles.

Les applications menstruelles répondent à cette demande en proposant un suivi quotidien du cycle, une visualisation des variations physiologiques et des estimations de fenêtres de fertilité. Elles promettent une meilleure compréhension du corps, parfois même une aide à la conception, ce qui renforce leur attractivité.

Des promesses de fertilité… qui peuvent induire en erreur

L’enquête de la DGCCRF met en évidence des formulations ambiguës qui entretiennent la confusion entre simple suivi menstruel et véritable méthode contraceptive. Certaines interfaces laissent croire qu’il serait possible d’éviter une grossesse en se fiant aux prédictions fournies.

D’autres mettent en avant la possibilité de tomber enceinte « facilement et rapidement », comme si la précision algorithmique suffisait à maîtriser la conception. Or, les cycles sont naturellement variables et l’ovulation peut se révéler imprévisible.

Se baser sur ces outils pour éviter une grossesse expose directement à un risque de conception non désirée. Aucune de ces applications n’est reconnue comme un dispositif médical fiable et aucune ne fait l’objet d’une validation scientifique permettant d’en garantir l’efficacité.

Aucun statut médical : une fiabilité non garantie

La DGCCRF rappelle que la majorité de ces applications ne dispose pas du statut de dispositif médical exigé par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Sans marquage officiel, elles ne répondent ni à des critères de sécurité clairement définis, ni à une obligation de prouver leurs performances.

Les prédictions peuvent donc s’avérer approximatives, parfois incohérentes, ce que confirment d’ailleurs de nombreux retours d’utilisatrices. À l’issue des contrôles, quatre demandes de mise en conformité ont été adressées aux éditeurs concernés, et l’une des applications examinées s’est même retirée du marché français.

Clauses abusives et stratégies commerciales agressives

Au-delà des limites techniques, l’administration souligne des pratiques commerciales particulièrement préoccupantes. Certaines applications se dégagent de toute responsabilité en cas d’erreur ou d’inexactitude, y compris lorsque ces dysfonctionnements peuvent conduire à une grossesse non prévue.

D’autres entretiennent un sentiment d’urgence en affichant de faux comptes à rebours ou des promotions artificiellement limitées, dans le but de pousser les utilisatrices à souscrire un abonnement.

Des fonctionnalités sont présentées comme indispensables pour augmenter les chances de concevoir, alors même que cette efficacité n’est pas démontrée. Les conditions générales, parfois mal traduites ou difficiles à lire, compliquent encore davantage la compréhension des droits des consommatrices. Pour faire cesser ces dérives, la DGCCRF a émis quatre injonctions visant à imposer une mise en conformité immédiate.

Des données intimes massivement collectées : un risque supplémentaire

Les applications contrôlées recueillent un volume important d’informations sensibles : données physiologiques, retards de règles, symptômes, habitudes intimes. La manière dont ces données sont exploitées ou partagées demeure insuffisamment transparente.

 La DGCCRF s’inquiète des risques associés à une utilisation commerciale de ces informations particulièrement intimes. Une transmission formelle a été effectuée à la CNIL, qui devra évaluer la conformité de ces traitements aux règles de protection des données personnelles.

Des outils utiles pour le suivi… mais pas pour la contraception

Si ces outils numériques peuvent aider à mieux observer ses cycles ou repérer certaines tendances, leur fonction reste strictement informative. Ils ne peuvent jouer aucun rôle contraceptif ou constituer un moyen fiable pour favoriser la conception. La DGCCRF insiste sur la nécessité de se tourner vers des méthodes validées médicalement, des dispositifs certifiés ou encore des professionnels de santé pour obtenir des conseils fiables.

L’administration compte poursuivre ses contrôles afin de s’assurer que les éditeurs concernés se mettent en conformité et cessent d’entretenir une ambiguïté dangereuse pour les utilisatrices.


 
 
 

 
 
 
 
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