Usurpations de numéros : l'Arcep renforce son arsenal de protection des consommateurs

Les mesures se multiplient, mais le phénomène persiste. Face à l’explosion des usurpations de numéros et aux nombreuses alertes de consommateurs, l’Arcep engage une réforme d’envergure du plan national de numérotation.
Au cœur de cette décision, publiée ce jour : une série de dispositifs destinés à sécuriser les appels, protéger les abonnés et moderniser la gestion des ressources téléphoniques en France et en Outremer. Une évolution qui s’inscrit dans un contexte où les fraudes téléphoniques constituent l’un des vecteurs d’arnaques les plus actifs en France.
18 000 usurpations de numéros depuis janvier : un signal alarmant
La plateforme « J’alerte l’Arcep » a enregistré près de 18 000 signalements d’usurpation de numéros depuis le début de l’année 2025. Une hausse spectaculaire qui illustre la capacité des fraudeurs à exploiter les failles résiduelles du système, malgré l’existence du MAN : le mécanisme d’authentification du numéro d’appelant instauré par la loi de 2020.
Ce système oblige déjà les opérateurs à bloquer les appels non authentifiés et à transmettre les informations permettant de remonter à la source des appels frauduleux. Mais ces protections, bien que massivement déployées, ne suffisent plus : les auteurs d’arnaques parviennent encore à utiliser aléatoirement des numéros mobiles français, causant de sérieux désagréments aux abonnés qui voient leur numéro utilisé à leur insu et doivent ensuite gérer des retours parfois agressifs d’individus sollicités frauduleusement.
Un trio de mesures pour sécuriser l’affichage des numéros
Pour répondre à ces dérives, l’Arcep a conduit une consultation publique cet été. Les retours ont permis de façonner trois mesures fortes visant à renforcer la fiabilité de l’affichage des numéros et à combler les fragilités restantes.
1. Les appels internationaux non authentifiés basculés en “numéro masqué”
À compter du 1er janvier 2026, tout appel provenant de l’étranger et présentant un numéro mobile français non authentifié devra s’afficher en « numéro masqué ».
Pourquoi cette mesure ? Parce qu’en pratique, une immense majorité des appels frauduleux utilisant des numéros usurpés proviennent de l’international.
Les opérateurs français disposent désormais de protocoles permettant d’authentifier la plupart des appels en itinérance car plus de 80 % d’entre eux le seront fin 2025. Mais durant la transition, appels légitimes et appels usurpés resteront difficilement distinguables.
Le masquage devient donc un outil temporaire mais nécessaire pour protéger les usagers, en attendant que 100 % des appels en roaming puissent être authentifiés.
2. Un masquage recommandé en cas de limitations techniques
Certaines infrastructures anciennes, notamment lors de renvois d’appel, ne transmettent pas correctement les données d’authentification. Une brèche exploitable par des fraudeurs expérimentés.
Dans ces cas, l’Arcep recommande le masquage du numéro, afin d’éviter à la fois les interruptions injustifiées et les risques d’usurpation.
Les opérateurs devront alors conserver la signature d’origine, documenter les difficultés techniques rencontrées et en rendre compte au régulateur.
3. Une vérification contractuelle renforcée des numéros autorisés
Désormais, les opérateurs devront inscrire dans le contrat avec leurs clients la liste précise des numéros qu’ils sont autorisés à présenter lors d’un appel. Toute utilisation en dehors de cette liste sera techniquement impossible.
Une clarification essentielle pour renforcer la « chaîne de confiance » du mécanisme d’authentification, en empêchant les détournements par des acteurs malveillants.
Une nouvelle catégorie de numéros dédiée à l’intérêt général
Autre nouveauté majeure : la création d’une catégorie de numéros réservés aux messages et appels automatisés d’intérêt général.
Prévue par la loi du 30 juin 2025, cette mesure entend mettre fin à la confusion entre messages officiels et sollicitations commerciales en créant une distinction nette entre communications publiques et privées.
Seules les organisations officiellement désignées par arrêté ministériel pourront utiliser ces numéros, ce qui permettra d’éviter que des escroqueries se fassent passer pour des services publics.
Outremer : de nouvelles tranches de numéros pour accompagner les besoins
Dans les territoires ultramarins, l’Arcep actera l’allocation de nouvelles tranches de numéros afin de faire face à la croissance des usages numériques, à l’arrivée de nouveaux services et aux besoins des entreprises.
Une mesure indispensable dans certaines zones où la pression sur les ressources devient tangible.
Un délai minimum avant la réaffectation des numéros résiliés
Enfin, le régulateur introduit un délai incompressible de 45 jours avant qu’un numéro ne puisse être attribué à un nouvel utilisateur lorsque la résiliation est initiée par un opérateur.
Cette mesure permet à un abonné de demander la récupération de son numéro avant qu’il ne disparaisse du répertoire. Une revendication remontée à la fois par les opérateurs et par les utilisateurs via la plateforme « J’alerte l’Arcep ».
Une réforme structurante pour moderniser un système sous pression
En toile de fond, c’est toute la question de la confiance dans l’écosystème téléphonique qui est en jeu. Les fraudeurs disposent d’outils de plus en plus sophistiqués et exploitent chaque faille résiduelle. L’Arcep cherche donc à rendre l’affichage d’un numéro à nouveau fiable qui est une condition indispensable pour que les appels restent un canal de communication sûr.
Au-delà de l’aspect sécuritaire, cette réforme répond aussi à l’évolution rapide des usages, à l’impact des lois récentes et aux contraintes croissantes sur les ressources de numérotation.
Avec l’entrée en vigueur progressive de ces mesures à partir de 2026, la France se dote d’un cadre plus robuste, plus lisible et mieux adapté aux enjeux actuels de protection des consommateurs.
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